La République Centrafricaine, pays situé au cœur de
l’Afrique, est une ancienne colonie
française qui a obtenu son indépendance depuis le 13 Août 1960. Après le départ
des colons, quelques fils du pays nantis d’instruction, héritage de la colonisation,
ont numériquement remplacé les blancs. Mais le pays a un besoin ardent des
intellectuels. C’est ainsi que les premiers meilleurs cadres bien formés
étaient recrutés comme enseignants. De même, à cette époque, certains
enseignants avaient aussi occupé des postes très importants dans
l’Administration.
Est-ce que ces enseignants continuent de préserver leur
privilège comme auparavant ? Enseigner signifie quoi ?
Enseigner vient du latin : « Insignare » qui signifie
transmettre des connaissances à autrui. Transmettre des connaissances à autrui
nécessite beaucoup de vertus telles que la maîtrise de soi, la pédagogie, la
psychologie, etc. De ce fait, enseigner
est un art très délicat que seulement une personne avertie en la matière pourra
l’exercer. Depuis l’antiquité, jusqu’à nos jours, ceux qui ont la compétence de
transmettre des connaissances sont appelés « Enseignants ». Du temps jadis, ils
étaient des personnes nobles, craintes et respectées. Aussi les appelait-on : «Maîtres ». Jésus était un enseignant par excellence. Ainsi ses
apôtres l’appelaient « Rabbi » c’est-à-dire « Maître ".
Comme partout ailleurs,
en République Centrafricaine, il y a des hommes et des femmes qui ont
opté pour
ce métier. L’enseignant du public est d’abord un fonctionnaire intégré dans la
Fonction Publique, qui a ses devoirs vis-à-vis de l’Etat et aussi il a ses
droits. Nous dirions même plus de devoirs parce que ce « Distributeur de
connaissances » a l’obligation d’éduquer et de former la jeunesse qui est
l’avenir d’une nation. Pour ce faire, il doit se dévouer pour que son
enseignement atteigne le but et le dynamisme, ce qui fournira à notre pays des
cadres adéquats pour son développement. En compensation, le pays par le biais
de l’organe étatique a également l’obligation de reconnaître à l’enseignant ses
droits comme tout autre fonctionnaire. Quelles sont les conditions de travail
de l’enseignant centrafricain ? Comme le titre de cet article l’indique, elles
sont précaires.
En effet, depuis les Etats généraux de l’enseignement qui
se sont tenus en 1996 et dont le but est d’améliorer les conditions de travail
des enseignants centrafricains jusqu’à nos jours, bon nombre de recommandations
et de résolutions sont restées lettres mortes, oubliées dans les tiroirs de nos
dirigeants qui ont la charge de leurs applications.
Dans les années 60 jusqu’au début des années 70, on
payait aux enseignants les primes de rendement pendant les vacances. Mais tout
cela a été supprimé. Les frais d’installation des jeunes enseignants seront
également supprimés. Les statuts particuliers spécialement pour certains corps
seront reconnus, mais ceux des enseignants classés. Pire encore, les primes de
départ à la retraite sont payées aux autres fonctionnaires et non aux
enseignants.
L’enseignant centrafricain, qui jadis, était le miroir de
la jeunesse et même de la communauté toute entière ne l’est plus aujourd’hui.
Il est réduit à l’état de misère et de pauvreté sans pareilles. En comparaison
avec les fonctionnaires des autres catégories, et relevant d’autres
départements ministériels, les enseignants sont les plus défavorisés du point
de vue du bien-être. C’est ainsi que cette vie précaire qui n’a connu aucune
amélioration depuis des décennies aggravée par la dévaluation du franc CFA, les
flambées de prix renforcées par les crises politico-militaires et les crises
financières internationales, tout cela sans mesure d’accompagnement, a plongé
les enseignants centrafricains dans une situation exécrable matériellement,
financièrement et socialement. Eu égard à ce qui précède, certains enseignants
se sont livrés à des comportements rétrogrades tels que : rackettage, vente des
polycopes, marchandage des notes, etc.
Par ailleurs, les quelques courageux qui se sont inscrits
à l’université avec l’espoir de se faire reclasser plus tard à l’issue de leurs
formations, se sont vus léser. La plupart n’ayant pas de maison personnelle
sont astreints à louer après vingt (20) ans de service. L’enseignant
centrafricain qui est le bâtisseur numéro un de la nation est un laisser pour
compte quand il est malade. Sa prise en charge sanitaire ne préoccupe
aucunement les chefs hiérarchiques. Un enseignant se serait écroulé devant les
élèves par la suite, il semblerait que ce dernier n’avait pas mangé depuis deux
(02) jours.
Ceci démontre à suffisance que l’enseignant qui a un
salaire de misère aussi bien que l’enfant du centrafricain le plus démuni ne
sont pas épargnés de la malnutrition.
Pour se rendre au lieu de leur travail,
rares sont ceux qui ont un moyen de déplacement et ceux qui sont capables
d’assurer leur transport avec leurs faibles indemnités de compensation. Les
enseignants affectés dans des communes et des villages les plus reculés sont
purement et simplement confondus aux paysans, parfois ils sont oubliés par
leurs chefs hiérarchiques, qui eux aussi, n’ont pas de véhicule pour les
tournées, les visites pédagogiques. Pour ce qui est du matériel didactique,
ceci est quasiment inexistant. Les structures d’accueil sont très insuffisantes
et délabrés d’où pléthore d’effectif d’élèves rendant les démarches
pédagogiques difficiles.
Compte tenu de la situation précaire des enseignants
décrite, il n’est donc pas surprenant que certains s’en aillent coûte que coûte
à la mutation, au reversement dans d’autres corps, cherchant des nominations
politiques ou demandant une mise en disponibilité pour s’orienter ailleurs. Le
DVA illustre bien nos propos par le départ massif des enseignants techniquement
compétents de tout ordre d’enseignement. Ce fait a engendré un manque
d’enseignants compétents laissant la main libre aux vacataires et aux «
maîtres-parents » entrainant une baisse de niveaux, etc.
A la vue de cette dégradation des enseignants
centrafricains, il est important que notre gouvernement révise la situation des
nôtres à l’instar des autres pays africains qui ont déjà amélioré les
conditions de travail des leurs. Malgré le déblocage des salaires, les
ouvertures des comptes bancaires avec accès aux crédits, les paiements de
quelques mois d’arriérées, l’intégration de quelques jeunes enseignants dans la
Fonction Publique, cela ne suffit pas car beaucoup reste à faire afin que les
enseignants centrafricains puissent atteindre le diapason de la mondialisation
pour que décolle la République Centrafricaine.
MANDATI
Laurent Sadrick
des
Equipes Enseignantes de Centrafrique
Voir: EECO - Buletin - décembre
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