Conférence Internationale
des ONG
du 14 au 16 décembre 2022
Photo: Mme Christine Roche et p. Albert Kabuge, représentants de l'UMEC-WUCT à l'UNESCO
Trois journées bien remplies ont rassemblé comme tous les
deux ans les ONG en relation de partenariat avec l’Unesco au siège de
l’organisation à Paris. Parmi les 401 dotées de ce statut de partenariat, une
centaine se sont mobilisées, à Paris ou en ligne. Comme à l’accoutumée, cette
conférence aura permis de faire le point et envisager l’avenir des coopérations
entre les ONG -sous l’égide de son Comité de liaison- et l’Unesco, ainsi que
sur les principales activités de cette importante composante de la société
civile (ONG, organisations non gouvernementales- ou OCS -organisations de la
société civile -) que représentent ces structures: les forums (en particulier ,
celui tenu récemment à Ottawa autour du thème de deux des « décennies Unesco »
(celles des Océans et des Langues autochtones), les webinaires (organisés
notamment lors du confinement covid), la réflexion collective sur l’éducation
(CCONG Education 2030).
Trois séances thématiques ont porté sur 1/ « Approches multipartites pour
atteindre les ODD : opportunités et défis pour les ONG », 2 / le rôle des OSC
dans la transformation de l’Education, et 3/ les relations entre ONG et
Commissions Nationales Unesco. Une vingtaine d’orateurs, essentiellement issus d’ONG,
se sont exprimés. Les échanges tenus en mode hybride ont apporté des éléments
d’information intéressants illustrant bien ce qui peut résulter de la
coopération des ONG à l’Unesco.
Ces séances thématiques ont étayé le travail collectif de
réflexion et proposition des ONG sur les enjeux du prochain biennium de la
CIONG : plusieurs séances de travail ont donné la parole aux ONG présentes dans
la salle et en visio pour exprimer leurs propositions . Un nouveau Comité de
Liaison a été constitué dont la plupart des membres étaient nommés d’office par
le jeu des quotas géographiques et statutaires (4 ONG en statut d’association
et 6 de consultation). Sa composition sera consultable sur le site du Comité de
Liaison.
On récapitulera ci-après les principales idées ayant
retenu notre attention.
Discours introductifs
M Matoko Directeur-Général adjoint en charge des
relations extérieures et M Davide Grosso Président sortant du Comité de liaison
ont tous les deux souligné l’importance que revêt l’ancrage des ONG à l’Unesco
pour contribuer à son bon fonctionnement et à l’organisation d’évènements au
siège mais aussi régionalement, et apporter leurs concours aux « Grands
Programmes » avec la richesse de leurs expériences « sur le terrain ». On s’est
aussi félicité du fait que la continuité ait pu être assurée pendant le
confinement (ex : réunion des ONG via Zoom)
Débats,
propositions des ONG
Réactions au
rapport d’activité du Comité de Liaison :
proposition pour de nouvelles améliorations du site du
CDL, notamment en mettant plus en exergue ce que fait le CDL, en assurant la
promotion des grandes initiatives que peuvent prendre les membres de la CIONG.
donner les informations plus en amont lorsqu’elles
concernent les sujets soumis à débat
plus associer la jeunesse-
Le groupe de travail sur l’Education s’est
particulièrement impliqué pour s’exprimer sur les grands chantiers en cours :
réflexion avec le groupe de haut niveau sur l’Education, évènements organisés
sur « la Transformation de l’Education », suivi du mécanisme de coopération
pour le pilotage des ODD, et plus particulièrement de l’ODD4.
Idées suggérées pour améliorer la communication :
- une newsletter et mettre en place une plateforme de discussion
appel à ne pas tout attendre du CDL : il faut aussi que les ONG « se prennent
en main » (dans le même esprit) éviter des processus qui seraient uniquement «
descendants » : de l’importance d’un mode de fonctionnement plus ascendant, où
les ONG pourraient prendre pleinement leur part avec un CDL écoutant leurs
observations au lieu de tout attendre du CDL.
- mettre plus en évidence le rôle des parents lorsqu’on
porte notre attention à l’Education (il a été fait remarquer que le groupe de
réflexion « Education » ne perd pas de vue cette grande préoccupation )
Suggestions, propositions des ONG pour le nouveau biennium :
Globalement, souhait d’une meilleure participation des
diverses ONG qui se sont senties peu consultées par le CDL dans ses initiatives
:
- retour aux groupes thématiques, de réflexion, groupes
ad hoc
- demande d’une salle de réunion fournie par le
secrétariat par exemple un jour par semaine, à répartir entre les groupes qui
en feraient la demande)
- développer la communication du CDL sur les réseaux
sociaux, communication avec les jeunes
- création d’un « comité jeunes »
- laisser aux ONG le choix du sujet des forums des ONG,
en fonction des besoins émanant de leur connaissance du terrain
- forums plus « inclusifs », participation des plus
pauvres ou marginalisés
projet d’une table ronde sur le dialogue interreligieux
en vue de la paix
- intervention de plusieurs ONG de jeunes ou orientées
jeunes : UMEC, IAAS, MIJARC, et du CCIC
Un comité de rédaction a mis en forme ces demandes sous
forme de recommandations à la Directrice Générale et au nouveau Comité de
Liaison, ces recommandations seront consultables sur son site.
Séances thématiques
1- « Apports multipartites des ONG pour les
objectifs du développement durable (ODD) : opportunités et défis pour les ONG »
Témoignages variés (ONG, ONU, Fondation) avec in fine des
expressions qui se rejoignent pour souligner la nécessité d’associer le plus
possible les organisations de la société civile pour nourrir les réflexions sur
les sujets majeurs que vise l’agenda 2030 dans la perspective d’un monde
meilleur, avec les ODD. La diversité de ces acteurs souvent très ancrés dans
les réalités concrètes peut aider assurément à la réussite de ces objectifs
adoptés par les organisations gouvernementales, cela a été bien mis en évidence
dans les commentaires, notamment par le représentant de l’ONU, ou par des
exemples donnés (ex : un dialogue entre acteurs du pourtour méditerranéen).
Mais même si les avis ont été assez consensuels quant à l’efficacité des
dialogues et autres initiatives misant sur de larges coopérations, on n’aura
pas manqué de noter que les situations ne sont pas toujours faciles : il ne
faut pas penser que forcément les ONG sont les bienvenues, il y a des
résistances qui tiennent à la fois à des
traditions ou à des positions de principe réservées du côté des politiques ; en
tout état de cause, a-t-on ajouté, les ONG doivent se prendre en main si elles
souhaitent être plus impliquées et ce, quelles que soient les situations
(locales, nationales ou internationales) : rien ne viendra tout seul, pour
reprendre une expression entendue.
Au-delà des questions de reconnaissance et de
participation des ONG , notamment pour la mise en œuvre des ODD, on a, à juste
titre, évoqué la façon dont devraient être menés les débats : il peut y avoir
de la conflictualité, ce risque doit être évité au travers d’échanges nourris
de respect de l’autre, d’empathie et surtout focalisés non sur des idées
générales mais sur des réalités faites d’exemples positifs comme ce qui peut
être fait en rapport avec les jeunes ou la défense des femmes et des jeunes filles.
Une autre idée a été évoquée en rapport avec la
redevabilité : bien rendre compte de ce qui est fait et, surtout, des résultats
positifs sur des sujets d’intérêt commun, est de nature à susciter l’intérêt
et, partant plus d’adhésion.
Dernier argument avancé pour justifier la mobilisation
effective des ONG : les consultations, elles sont de plus en plus nombreuses,
avec bien souvent des contenus pouvant les concerner pleinement. De
l’importance d’y prêter une grande attention.
Au fil des interventions, on note l’évocation des 25 ans
de la déclaration de Pékin, regrettant que l’égalité de genre ne soit pas
assujettie au devoir de rendre compte, le rôle des 57 millions de jeunes qui
par leur engagement scout contribuent à la mise en œuvre des ODD, ne serait-ce
que par l’appel de Baden Powell à laisser le monde en meilleur état qu’il l’ont
trouvé, l’importance de la recherche interculturelle, l’abandon souhaitable
d’une culture « du Nord » qui devrait servir de modèle de référence aux pays «
du Sud », de l’importance de processus de co-création.
2- L’évolution du rôle et du futur des organisations
de la société civile (OSC) et des partenariats dans le mouvement mondial
pour la transformation de l’Education dans un monde en crise et en plein
bouleversement »
Les intervenants ont situé leurs propos par rapport aux
grandes initiatives de l’Unesco en matière d’Education pour bien souligner le
rôle pro-actif qu’ont joué et que jouent encore les ONG comme force de
proposition ; on aura retenu que leurs analyses ont été bien prises en compte,
en particulier pour ce qui a trait à la Transformation de l’Education et aux
sujets suivants que les ONG ont fait valoir : Education aux Droits de l’Homme,
suivi de l’ODD4 avec des cibles et des indicateurs bien précisés et déclinés
régionalement. En effet, par l’intermédiaire de la CCONG- Education 2030,
organe de réflexion collective dont est membre de droit un membre du Comité de
liaison -en l’occurrence Mme Machon
Honoré – qui permet aux ONG de l’Unesco de faire entendre leur voix, la société
civile est représentée jusqu’aux instances suprêmes comme en juin et septembre
2022 à l’Unesco puis à l’ONU au TES (Transforming Education Summit) et
participe à l’élaboration du GEM (Global Education Monitoring Report) Autres
problématiques essentielles, les questions touchant au dérèglement climatique
et à la biodiversité, ces sujets sensibles sont à intégrer dans les
enseignements, il y a là des sensibilisations à mener mais aussi des alertes à lancer pour agir
sans faute à raison des risques encourus. Au fil des témoignages, on aura noté
un plaidoyer pour mettre les soft skills au même niveau que les hard skills, en
particulier en développant l’apprentissage émotionnel, le refus d’un monde qui
sépare l’ émotion de la raison, d’une éducation qui se concentrerait sur les
techniques en oubliant l’art, la créativité, la philosophie…l’alerte sur la
numérisation qui déshumanise, l’importance d’éduquer pour la liberté et non
pour le marché, l’idée de prendre en compte dans les évaluations les
compétences sociales en plus des résultats académiques. Par ailleurs considérer
l’éducation comme un droit humain et non comme un service éviterait que le
budget alloué à l’éducation soit aussi fragile.
A noter le thème de l’éthique qui a été évoqué, mais
seulement très brièvement, par uniquement une ONG .
3- « Plus forts ensemble : Travailler avec les
commissions nationales »
L’échange a été introduit par une présentation des
résultats d’une enquête menée par un groupe de travail du Comité de Liaison
auprès des ONG sur l’état de leurs relations avec les Commissions nationales de
l’Unesco. Même si les retours ont été décevants en terme de nombre de réponses,
leur contenu a été intéressant en ce qu’il révèle une grande méconnaissance
réciproque de ces instances; quand bien même n’y a-t-il pas de critiques
formulées pour envisager des rapprochements sur le fond, il apparaît qu’on ne
sait pas bien comment faire.
A l’occasion de
cette présentation, il a été rappelé que ces Commissions existent à part
entière et jouent un rôle utile dans de nombreux pays, avec parfois un grand
nombre de collaborateurs comme en Allemagne, ou bien réduites à un
fonctionnaire à temps partiel dans d’autres . Le Secrétaire général de celle du
Royaume Uni est intervenu pour montrer comment la Commission britannique jouait
un rôle de conseiller du gouvernement, avec le bénéfice qu’elle pouvait tirer
de l’écoute d’organisations de la société civile (un exemple a été donné pour
l’élaboration d’un texte sur les infirmières). Celui de la Commission Nationale
Canadienne souligne la pertinence de faire concorder les demandes de
partenariat émanant des ONG avec les priorités nationales à laquelle elles
s’adressent, qui les définissent dans leurs stratégies communiquées à l’Unesco.
La Commission Nationale Française pour l’Unesco fait remarquer qu’elle a publié
un guide sur les Commissions Nationales de l’Unesco.
En conclusion on aura retenu deux idées fortes extraites au fil des échanges :
A propos des jeunes : on a beaucoup insisté sur le
bien-fondé et la nécessité de leur implication ; il y a avec leur énergie et
leur capacité à produire des idées nouvelles de puissants leviers pour faire
face aux grands défis de notre époque (ces idées ont été développées lors d’une
session consacrée à leur sujet)
Le croisement des regards et l’importance des rencontres
: ces deux dispositions à « l’intelligence de l’autre » ont été reprises en
termes éloquents par une experte en éducation artistique pour montrer toute la valeur des arts et leur pouvoir
créateur d’harmonie. L’observation très juste en ces domaines culturels
pourrait être formulée pour une application bien plus générale : n’est-ce pas en
effet dans l’Education que l’on doit retrouver ces deux propriétés, et, pour
tout dire n’a-t-on pas ici beaucoup de richesses à exploiter comme l’essence de
ce qui devrait gouverner notre humanité ?
Une visite des Œuvres d’art de l’Unesco était proposée
aux ONG. La salle II où s’est réunie la CIONG est décorée depuis sa création en
1958 d’une fresque de Tamayo figurant Prométhée apportant le feu aux
hommes.
CCIC-UNESCO